  
La Commission et le Parlement européen
relancent les
priorités de l’Union

On aurait pu craindre que la gestion de la pandémie et la
relance économique (une cinquantaine d’actes textes législatifs adoptés)
laissent au second plan les thèmes annoncés dès le début de la législature
comme étant les priorités de l’Union européenne : le climat, le numérique,
une Europe « géopolitique »
Or, le 16 septembre, dans son Discours sur l’Etat de
l’Union devant le Parlement européen, Ursula von der Leyen
a réaffirmé ces priorités en y ajoutant la santé, conséquence logique de la
crise.
Concernant la lutte contre le changement climatique, la
présidente de la Commission a proposé de porter la réduction des émissions de
gaz à effet de serre d’ici à 2030, de 40 % actuellement à 55%, compromis qui
semble acceptable entre les demandes du Parlement (60%) des ONG (65%) et les
réticences de certains pays. 30% des 750 milliards d’€ du plan de relance
« Next Generation EU » seront levés au moyen d’obligations vertes.
37% de ce plan de relance seront consacrés directement aux objectifs du
« Pacte vert ».
Le numérique bénéficiera de 20% des subventions et prêts du plan
de relance.
Le renforcement de l’Union sur la scène mondiale s’appuiera sur
la mise en œuvre d’une taxe carbone aux frontières et, dans le cas où aucun
accord international ne serait trouvé, sur la création d’une fiscalité
numérique. En 2021 aura lieu une mise à jour de la stratégie industrielle de
l’Union: révision des règles de concurrence, encadrement des subventions
étrangères, alliances dans les secteurs stratégiques. Le langage a été plutôt
direct vis à vis de la Chine ou de la Russie. Ursula von der Leyen a appelé les
Etats à abandonner la règle de l’unanimité dans les prises de décision du
Conseil en matière de politique étrangère.
Une Europe de la santé est proposée avec la création d’une
Agence européenne de recherche et de développement dans le domaine médical,
analogue à celle dont disposent les USA (BARDA)
Ont été en outre annoncés le prochain « Pacte sur la
migration et l’asile » » (que nous examinerons dans une
prochaine lettre) et la mise en chantier de l’instauration d’un salaire
minimum européen.
Au cours de la même session parlementaire, la Parlement européen
a approuvé la procédure permettant à l’UE d’emprunter 750 milliards d’euros
pour financer le plan de relance. Il a voté en faveur d’une refonte du
Mécanisme de protection civile de l’UE pour lui permettre de faire face aux
crises majeures. Il a approuvé une augmentation du budget de 6.2 milliards d’€
pour accélérer le développement d’un vaccin, adopté le règlement sur la mise en
œuvre du « Fonds de transition juste » qui, au sein du plan de
relance, permettra d’aider les régions dépendant fortement des énergies
fossiles. Le Parlement a voté en faveur de l’inclusion du transport maritime
dans le système européen d’échange de quotas d’émissions (SEQE-SE).
Les négociations se poursuivent en « trilogue » (entre
le Conseil, le Parlement et la Commission) pour réduire les divergences sur le
plan de relance et le budget pluriannuel de l’UE. Le Parlement demande un
calendrier contraignant sur la création de ressources propres destinées à
rembourser l’emprunt du plan de relance. Il demande des augmentations de budget
sur les programmes Erasmus+, la recherche (Horizon 2020), ou le programme
santé. Il demande un mécanisme qui protège le budget des détournements, dans
les Etats où l’Etat de droit est mis en cause.
Ainsi va la démocratie européenne : une suite de compromis
entre les Etats, au sein du Parlement, avec la Commission. L’Europe avance,
malgré la règle périmée de l’unanimité qui l’empêche de progresser en matière
de fiscalité, de politique sociale et de politique extérieure. A ce sujet, les
travaux à venir sur la Convention pour l’avenir de l’UE pourraient présenter
des avancées décisives.
François Vié, président du ME62
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