LE BILLET  EUROPÉEN  du 27 mai 2025






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Marché unique : une nouvelle stratégie




La Commission dévoile une nouvelle stratégie pour lever les barrières internes et inciter les entreprises à investir en Europe.

L'objectif de la stratégie de la Commission européenne est de créer un marché intérieur "plus simple, plus homogène et plus solide". Mais l'engagement de tous les États membres sera indispensable à son succès. 

Dans un contexte international instable et face à une pression croissante sur la compétitivité de l'UE, la Commission européenne a dévoilé ce mercredi 21 mai 2025 sa nouvelle stratégie pour le marché unique. Objectif : redonner de la vigueur à cet espace de libre circulation des biens, des services, des capitaux et des personnes, en réduisant les obstacles qui freinent son potentiel économique.

À l’initiative du vice-président exécutif de la Commission, le Français Stéphane Séjourné, cette stratégie entend faire du marché intérieur "le meilleur choix pour les entreprises, les travailleurs et les consommateurs" européens, en devenant un levier central de croissance, de simplification administrative et de souveraineté économique en Europe . . .





L'objectif de la stratégie de la Commission européenne est de créer un marché intérieur "plus simple, plus homogène et plus solide". Mais l'engagement de tous les États membres sera indispensable à son succès.

Stéphane Séjourné, le vice-président de la Commission européenne en charge de la Prospérité et de la Stratégie industrielle, a présenté la stratégie de la Commission sur le marché intérieur ce mercredi 21 mai - Crédits : Lukasz Kobus / Commission européenne

Dans un contexte international instable et face à une pression croissante sur la compétitivité de l'UE, la Commission européenne a dévoilé ce mercredi 21 mai 2025 sa nouvelle stratégie pour le marché unique. Objectif : redonner de la vigueur à cet espace de libre circulation des biens, des services, des capitaux et des personnes, en réduisant les obstacles qui freinent son potentiel économique.

À l’initiative du vice-président exécutif de la Commission, le Français Stéphane Séjourné, cette stratégie entend faire du marché intérieur "le meilleur choix pour les entreprises, les travailleurs et les consommateurs" européens, en devenant un levier central de croissance, de simplification administrative et de souveraineté économique en Europe.

Un marché unique encore inachevé

Plus de trente ans après sa création, le marché unique européen reste une réussite partielle, constate Bruxelles. Certes, il a permis une hausse de 3 à 4 % du PIB de l'Union et la création de 3,6 millions d'emplois. Mais son potentiel reste largement sous-exploité. Selon la Commission, parfaire son achèvement permettrait de doubler les gains actuels.

Le nouveau plan d'action dévoilé par Stéphane Séjourné s'appuie sur les constats posés dans les rapports d'Enrico Letta (avril 2024) sur le marché unique, puis de Mario Draghi sur la compétitivité (octobre 2024). Tous deux pointaient l'enchevêtrement des normes, la fragmentation réglementaire et l'insuffisante volonté des États membres comme principaux freins à une plus grande intégration économique européenne.

La stratégie dévoilée par la Commission cible en particulier dix obstacles jugés parmi les plus nocifs pour la libre circulation des biens et des services. Figurent notamment la complexité de l'établissement des entreprises, les divergences dans la reconnaissance des qualifications professionnelles, l'absence de normes communes, ou encore des réglementations nationales trop contraignantes dans certains services. Ces barrières, identifiées à l'issue d'une vaste consultation des acteurs économiques, nuisent directement à la compétitivité et à l’investissement au sein de l'Union européenne, estime Bruxelles

Un marché plus simple, plus homogène, plus solide

La stratégie de la Commission européenne pour rendre le marché unique "plus simple, plus homogène et plus solide", repose sur cinq grandes priorités :

1- Stimuler les services, notamment dans le secteur de la construction et de la livraison. Deux législations européennes sont prévues : une loi sur les services de construction et une autre sur la livraison postale et les colis. L'objectif : moderniser les règles et faciliter les prestations transfrontalières, alors que les échanges de services stagnent.

2- Soutenir les PME, qui représentent 99 % des entreprises européennes. Une nouvelle définition des "PME à moyenne capitalisation" (qui représentent 38.000 entreprises de taille intermédiaire) leur permettra d'accéder à de nouveaux avantages réglementaires. Un nouvel outil numérique, le "SME ID", doit simplifier la vérification du statut de PME dans toute l'Union.

3-  Simplifier les règles et numériser l'administration. Un quatrième paquet "omnibus" de mesures de simplification a été publié, réduisant déjà la charge administrative annuelle de 400 millions d'euros. La Commission entend faire de la transmission numérique des documents la norme dans les procédures liées à la législation sur les produits.

4- Renforcer l'appropriation politique du marché unique par les États membres. Chaque capitale devra désigner un "Sherpa" chargé de suivre l'application des règles européennes et d'éviter les sur-transpositions nationales.

5-  Accélérer la levée des obstacles réglementaires, en coordonnant les efforts entre la Commission, les États membres et les entreprises. L'objectif est de créer un espace économique homogène, cohérent et propice à l'investissement.

Une volonté politique mise à l'épreuve

Si la stratégie est ambitieuse, sa mise en œuvre dépendra largement de la coopération des États membres, prévient Bruxelles. "Tant que les règles ne sont pas appliquées de manière uniforme, les citoyens et les entreprises ne peuvent pas bénéficier pleinement du marché unique", soulignait récemment Émilie Prouzet, membre du Comité économique et social européen (CESE), dans une interview à Toute l'Europe. Elle appelait à un changement d'approche : "Il faut passer de la déclaration d'intention à la volonté d'agir ensemble."

Cette fois, le contexte économique post-Covid, la montée des tensions commerciales internationales et les ambitions géopolitiques de l'UE (vis-à-vis des États-Unis et de la Chine notamment) pourraient jouer en faveur d'une mise en œuvre plus résolue. Reste à savoir si les États membres accepteront de jouer pleinement le jeu de l'intégration et de la discipline réglementaire.







Cinq ans après le Brexit :  le rapprochement ? . . .










Le 19 mai 2025, le Premier ministre britannique, Keir Starmer (au centre), a reçu à Londres la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, et le président du Conseil européen, António Costa, pour le tout premier sommet bilatéral entre l'UE et le Royaume-Uni depuis le Brexit - Crédits : Aurore Martignoni / Commission européenne

"Reset". Le mot était sur toutes les lèvres du gouvernement britannique ces dernières semaines. C'est lui qui a donné le ton du sommet, lundi 19 mai, entre l'Union européenne et le Royaume-Uni, le premier depuis le divorce entre les deux parties, il y a cinq ans. Une rencontre officielle entre Ursula von der Leyen, António Costa et Keir Starmer, qui visait à acter le rétablissement d'un dialogue structuré entre les deux rives de la Manche.

Depuis l'élection du travailliste Starmer à Downing Street en juillet 2024, les signaux de détente à l'égard du continent se sont multipliés : fin des provocations verbales, reprise des échanges techniques, initiatives politiques communes . . .  Le sommet du 19 mai a permis de franchir une nouvelle étape en venant joindre les actes aux nombreux discours d'intentions.

En rupture avec ses prédécesseurs conservateurs, Keir Starmer entend stabiliser les relations avec Bruxelles, sans raviver les tensions internes, car le Brexit divise toujours profondément la société britannique. Le populiste anti-européen Nigel Farage et son parti, Reform UK, restent puissants dans les sondages, tandis que les tabloïds ne se privent pas de crier à la "trahison" à chaque signe d'ouverture envers l'U.E.







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Le Premier ministre avance donc sur une ligne de crête, tentant de reconstruire une relation pragmatique avec l'Union, sans rouvrir la boîte de Pandore d'un éventuel retour du Royaume-Uni dans le marché unique ou l'union douanière.

Signature d'un pacte de défense et de sécurité

Dans un contexte international marqué par les menaces que fait peser la Russie de Vladimir Poutine et l'incertitude autour du partenariat avec les États-Unis de Donald Trump, la sécurité du Vieux Continent a constitué le point de convergence le plus naturel entre Bruxelles et Londres.

Le sommet a ainsi abouti à la signature d'un pacte de défense et de sécurité, qui prévoit une coopération accrue dans les domaines du renseignement, de la cybersécurité, de la protection des infrastructures critiques ou encore des opérations extérieures.

Surtout, cet accord doit amorcer une participation du Royaume-Uni à certains programmes européens d'achats militaires, via le futur mécanisme SAFE (Security Action For Europe), doté de 150 milliards d'euros. Un enjeu de taille pour l'industrie britannique de la défense. Mais plusieurs États membres, dont la France, veillent à ne pas ouvrir trop largement les vannes. Le texte reste volontairement vague, et une nouvelle négociation sera nécessaire pour en fixer les contours exacts.

De nombreux sujets à l'agenda des prochains mois

Outre la défense, les deux parties ont signé une déclaration d'intention qui énumère les sujets à négocier dans les mois à venir. Parmi eux : la mobilité des jeunes, la coopération énergétique, la reconnaissance des qualifications professionnelles, la régulation sanitaire, les échanges commerciaux et la pêche.

Sur ce dernier point, un compromis délicat a été trouvé. Les Européens ont obtenu une extension de douze ans de l'accès aux eaux britanniques, jusqu'en 2038. Une décision saluée à Paris, mais vertement critiquée par l'opposition conservatrice britannique. La cheffe des Tories, Kemi Badenoch, a dénoncé une "capitulation", tandis que les tabloïds pro-Brexit hurlent – une nouvelle fois – à la trahison.

Autre dossier explosif : la mobilité étudiante et professionnelle. Depuis la fin du programme Erasmus+ outre-Manche et l'instauration des visas pour les jeunes Européens, les échanges ont chuté. Plusieurs États membres plaident pour un accord sectoriel. Londres se dit ouvert à des discussions, mais rejette tout retour à la libre circulation.

Sur le plan économique, les discussions restent prudentes. Keir Starmer n'envisage pas de revenir sur les lignes rouges du Brexit, laissant la société s'emparer de ce sujet. Selon les derniers sondages, 55 % des Britanniques considèrent aujourd'hui le Brexit comme une erreur. Le patronat et certains syndicats défendent même l'idée d'un retour dans l'union douanière. Le gouvernement, lui, temporise.

En revanche, des accords techniques ciblés pourraient émerger. Le Royaume-Uni est déjà en discussion pour alléger les contrôles vétérinaires aux frontières, notamment pour les produits agroalimentaires. Un alignement "dynamique" sur certaines normes européennes pourrait aussi faciliter les exportations britanniques vers le continent.

L'un des rares domaines où le Royaume-Uni assume une position résolument distincte de l'UE est celui de la régulation technologique. Tandis que les Vingt-Sept ont adopté un AI Act encadrant strictement l'intelligence artificielle, Londres privilégie une approche plus souple, tournée vers l'innovation et l'attractivité économique, qui rapproche le pays du modèle américain. Mais cette autonomie réglementaire pourrait poser des problèmes à moyen terme : divergences de normes, difficultés d'interopérabilité et risques pour les investissements croisés.

Instaurer une relation gagnant-gagnant

Le sommet du 19 mai a donc permis de poser les bases d'un nouveau cycle de coopération, après cinq années de tensions et de brouilles. Pour Bruxelles comme pour Londres, l'enjeu est désormais de donner corps à ce partenariat "post-Brexit", sans tomber dans une nostalgie européenne, ni dans une logique d'alignement automatique.

Côté britannique, le calcul est clair : face à l'imprévisibilité de Donald Trump, l'UE doit redevenir un partenaire stratégique de long terme. Le Royaume-Uni cherche à retrouver un rôle d'influence auprès du reste de l'Europe, sans revenir dans le giron communautaire. Côté européen, les attentes sont mesurées, mais la disponibilité est réelle.

Reste à voir si ce "reset" survivra à l'épreuve du temps et des prochaines échéances électorales. À court terme, il confirme une chose : le Brexit n'a pas clos le chapitre des relations entre l'Union européenne et le Royaume-Uni. Il a simplement ouvert une nouvelle phase, plus complexe, mais peut-être plus lucide.

Caty